Le droit international pénal rassemble les normes, institutions et procédures interétatiques qui qualifient des comportements particuliers de crimes et organisent de façon concertée la poursuite de leurs responsables devant les juridictions compétentes. Ce corpus iuris s’intéresse notamment à ce qu’Hannah Arendt appelait les « massacres administratifs »[1] et à ce que l’on connaît plus communément sous l’expression « crimes de masse » – même si le champ est en réalité plus large. Le droit international pénal est une création récente dont il faut bien apprécier le potentiel compte tenu de l’objet qui est le sien et du monde tel qu’il est.
[1] H. ARENDT, « Eichmann à Jérusalem », in Les origines du totalitarisme. Eichmann à Jérusalem, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », éd. de 2002, p. 1296.
La guerre n’est pas nécessairement un crime mais les crimes commis en relation avec la guerre sont des crimes de guerre.
Les crimes de guerre ont fait l’objet d’une réglementation plus précoce par le droit international. Les coutumes et les règles interétatiques visant à limiter les effets néfastes des guerres sont très anciennes. Au XIXème siècle, Henry Dunant, le fondateur de la Croix Rouge, a été à l’origine de traités réglementant les pratiques de guerre, imposant notamment le principe de protection des militaires blessés (cf. la convention de Genève de 1864). C’est sur ces bases qu’est fondé le droit international humanitaire (ou droit des conflits armés) consacré par la signature des quatre conventions de Genève en 1949. La "première convention de Genève pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne" reprend le texte, remanié, de la convention de 1864; la seconde porte sur "l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer", la troisième concerne le traitement des prisonniers de guerre et la quatrième est relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.
L’ensemble de ces conventions constitue le "droit de Genève" qui réglemente la conduite des hostilités lors des conflits internationaux. Elles ont été complétées par deux Protocoles additionnels adoptés en 1977 pour renforcer la protection notamment dans le cadre, cette fois, de conflits armés non internationaux. Avant la signature des quatre conventions de Genève en 1949, les crimes de guerre avaient également été définis dans le Statut du Tribunal de Nuremberg comme " les violations des lois et coutumes de la guerre. Ces violations comprennent, sans y être limitées, l’assassinat, les mauvais traitements et la déportation pour des travaux forcés, ou pour tout autre but, des populations civiles dans les territoires occupés, l’assassinat ou les mauvais traitements des prisonniers de guerre ou des personnes en mer, l’exécution des otages, le pillage des biens publics ou privés, la destruction sans motif des villes et des villages ou la dévastation que ne justifient pas les exigences militaires. "
Le statut du TPIY (articles 2 et 3) reprend mot à mot la définition de certains crimes donnée par le statut du Tribunal de Nuremberg, en ajoute d’autres concernant l’emploi d’armes toxiques et les destructions patrimoniales et fait explicitement référence aux Conventions de Genève de 1949.
• Connaître et comprendre les éléments nécessaires à la qualification d’un acte criminel en tant que « crime de guerre »
• Définition : les éléments des crimes de guerre sont représentés par les conditions qu’il est nécessaire de réunir pour qu’un acte soit qualifié de crime de guerre
• Remarque : il s’agit d’un comportement criminel qui est « aggravé » par les conditions de sa commission dans le cadre d’un conflit armé
• Un élément légal représenté par l’incrimination
• Un élément matériel de l’infraction : l’« actus reus ».
• Un élément moral de l’infraction : la « mens rea »
• L’existence d’une incrimination des comportements correspondant à une violation grave du Droit International Humanitaire …
• Remarques Générales
• Question délicate en DIPEN car les infractions n’ont pas toujours (et ne sont toujours pas…!) définies dans un texte unique
• Question de la criminalisation s’est posée dès la fin de la 2ème GM
• Seule référence au droit national pour incriminer un comportement de « crime de guerre » est insuffisante pour le poursuivre en tant que crime international
• Remarque générale
• La difficulté réside ici dans la variété des listes d’incriminations et des comportements punissables
• Caractère fastidieux de l’inventaire
• Inventaire fait dans l’article 8 du Statut de la CPI
Il n’y a pas, pour les crimes contre l’humanité, de définition généralement admise. Le Statut du Tribunal de Nuremberg désignait sous ce terme "l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation et tout acte inhumain commis contre toutes populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs politiques raciaux, ou religieux, lorsque ces actes ou persécutions, qu’ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du Tribunal, ou en liaison avec ce crime". Les statuts des Tribunaux pénaux internationaux pour la Yougoslavie et pour le Rwanda reprennent les crimes énoncés par le Statut du Tribunal de Nuremberg mais l’expulsion est substituée à la déportation et sont mentionnés en outre l'emprisonnement, la torture et le viol.
Connaître et comprendre :
• L’origine de la notion de crime contre l’humanité
• Les composantes de la notion de crime contre l’humanité
• Les acteurs du crime contre l’humanité : auteurs et victimes potentiels
• Le crime contre l’humanité intègre les trois éléments de l’infraction :
▫ Elément légal de l’incrimination
▫ Elément matériel de l’incrimination (actus reus)
▫ Elément moral de l’incrimination (mens rea)
• Elément légal du crime contre l’humanité : double fondement
• Un fondement coutumier que l’on peut dégager de la jurisprudence et de la cristallisation des principes depuis sa reconnaissance dans le statut des TMI puis des tribunaux ad hoc
• Un fondement textuel issu de l’article 7 du Statut de la CPI
• Une notion de victime du CCH qui dépasse la seule population civile
• La notion d’attaque généralisée et/ou systématique ne requiert pas la connaissance des détails
• La notion de persécution est définie de façon générique à travers l’intention discriminatoire
1. Aux fins du présent Statut, on entend par crime contre l'humanité l'un des actes ci-après commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile et en connaissance de cette attaque :
a) Meurtre;
b) Extermination;
c) Réduction en esclavage;
d) Déportation ou transfert forcé de population;
e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international;
f) Torture;
g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée et toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable;
h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sus du paragraphe 3, ou en fonction d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour;
i) Disparitions forcées;
j) Apartheid;
k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale
• Liste « non fermée » d’actes précisément identifiés
• Clause d’interprétation pour chacun de ces comportements criminels qui figure à l’article 7.2 du Statut
• Définition plus stricte à certains égards
La notion de crime de génocide a été pour la première fois explicitée dans un texte à portée internationale à l’issue du procès de Nuremberg. L’acte d’accusation des grands criminels de guerre allemands précisait en effet qu’ils s’étaient livrés " au génocide délibéré et systématique, c’est-à-dire à l’extermination de groupes raciaux et nationaux parmi la population civile de certains territoires occupés, afin de détruire des races ou classes déterminées de populations, et de groupes nationaux, raciaux ou religieux… ". La définition a ensuite été formalisée juridiquement dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948, définition qui a été reprise mot à mot, dans les statuts des Tribunaux pénaux internationaux pour la Yougoslavie et le Rwanda et dans l’article 6 du Statut de Rome. Dans ces textes, il est précisé que "le génocide s’entend de l’un quelconque des actes ci-après, commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel : meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe; transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe."
• Allemagne, Cambodge, Rwanda… Darfour? RDC?
• Baptisé le « crime des crimes »
• Vient de l’association de deux termes : le Genos – en grec – la race, la tribu et du suffixe « cide » en latin – tuer
Comme les autres crimes internationaux, le crime de génocide est composé de trois éléments :
• L’élément légal représenté par l’incrimination figurant dans la définition issue de la Convention de 1948 et dans les règles coutumières
• L’élément matériel – actus reus – représenté par les comportements génocidaires
• L’élément moral –mens rea – qui doit résider dans l’intention génocidaire
On distingue trois types des relations :
• Les relations entre le crime contre l’humanité et le crime de génocide
• Les relations entre le crime de guerre et le crime contre l’humanité
• Les relations entre le crime de guerre et le génocide
• Originairement le crime de génocide a été considéré comme une sous–catégorie du crime contre l’humanité
• Il existe trois éléments communs :
▫ Ils portent atteinte tous les deux aux fondements mêmes de l’humanité en violant les droits fondamentaux
▫ Ils ne sont pas commis de façon isolée mais à plus ou moins grande échelle et en tous les cas dans un contexte donné spécifique
▫ Ils sont commis soit directement par les autorités soit avec l’acquiescement ou la connaissance des autorités
• Confié à la compétence de la Cour Pénale internationale par l’article 5(1)(d) du Statut
• Aujourd’hui codifié à l’article 8 bis du Statut
• Particularité du crime d’agression : crime défini tardivement (conférence de révision de Kampala juin 2010)
• Qualification d’agression par un État est un élément sine qua non de la reconnaissance du crime d’agression
• Seul crime qui relève non pas du comportement dans la guerre mais du droit relatif au déclenchement d’une guerre
• 1. Aux fins du présent Statut, on entend par «crime d’agression» la planification, la préparation, le lancement ou l’exécution par une personne effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l’action politique ou militaire d’un État, d’un acte d’agression qui, par sa nature, sa gravité et son ampleur, constitue une violation manifeste de la Charte des Nations Unies.